DES INTÉRÊTS DES CONTRATS PUBLICS ET DE LA COMMANDE PUBLIQUE ET DE LEURS ÉTUDES EN AFRIQUE
Jean-Marc PEYRICAL
Maitre de conférences à l’Université de Paris Saclay
Directeur de la Chaire Achat Public de la Fondation de l’Université
Avocat associé
Président de l’Association pour l’Achat dans les Services Publics
J’ai pour habitude de débuter mon cours de Master I contrats et marchés publics à la faculté de droit de Sceaux en dévoilant les trois grands intérêts d’étudier une telle matière.
Le premier de ces intérêts est économique. Dans un pays comme la France, la commande publique- marchés publics, ce qui inclut les partenariats publics privés, et concessions, ces deux catégories concernant la part essentielle des contrats publics- représente entre 8 et 10% de son PIB, soit 200 milliards d’euros par an ; ce qui en fait le plus important instrument d’intervention public dans l’économie, avec toutes les conséquences sociales et en termes d’emploi que cela induit.
Le deuxième est juridique. La norme- interne mais aussi européenne et internationale- est en effet très présente dans un domaine comme celui de la commande publique. Et non seulement les règles et procédures de publicité et de mise en concurrence qui s’y appliquent sont relativement complexes à appréhender et à intégrer, mais elles sont appelées à évoluer en permanence sous l’effets de textes et de jurisprudences eux-mêmes en constante mutation.
Le troisième intérêt est politique. Sous l’influence de contrôles d’organismes comme la Cour des Comptes, la commande publique est devenue un symbole de bonne- ou de mauvaise- gestion publique. A côté de cela, la commande publique est de plus en plus instrumentalisée par les décideurs publics, à des fins certes louables- développement durable par exemple- mais quelquefois éloignées du cœur même de l’achat public- parité hommes femmes ou respect des grands principes républicains par exemple.
Ces trois intérêts traduisent une conception universelle de la commande publique, et plus largement des contrats publics. Ils se retrouvent bien évidemment au sein des Etats Africains où le poids économique, social et par la même politique de ces contrats ne cesse de s’alourdir avec le temps.
Les contrats et marchés publics en Afrique ne peuvent se résumer, même s’ils sont essentiels, aux grands travaux d’infrastructures portuaires, aéroportuaires ou encore routiers et autoroutier qui marquent régulièrement l’actualité…Les contrats publics, et tout particulièrement la commande publique, c’est une vue d’ensemble et transversale de la vie publique, de la chose publique et de ses relations avec le monde civil et économique. Ils reposent sur des piliers comme l’impartialité, la transparence, la probité ou encore la diligence qui en font des instruments vertueux au service des structures publiques et parapubliques.
Encore faut-il en avoir conscience et se donner les moyens suffisants afin que ces piliers ne restent pas virtuels. Au sein des Etats, des collectivités territoriales, des établissements publics ou encore des structures d’économie mixte que l’on retrouve dans tous les pays d’Afrique, cela doit se traduire par la création de véritables services d’achat, capables non seulement de passer mais aussi de suivre l’exécution de marchés publics, concessions et autres conventions d’occupation domaniale ; avec des acheteurs- négociateurs, juristes, financiers, techniciens, économistes…- compétents et responsables.
Et l’aptitude ou les aptitudes de l’acheteur passent avant tout par la formation, qu’elle soit initiale ou continue. A cet effet, la Chaire Achat Public de la Fondation de l’Université de Paris Saclay abrite non seulement un cycle de formation initiale via un Master 2 consacré à l’achat public mais a récemment ouvert un cycle de formation continue spécifiquement destiné aux fonctionnaires des Etats Africains afin justement de leur permettre de tendre vers un objectif incontournable de professionnalisation dans un domaine où les besoins sont immenses.
Je ne peux donc qu’être très heureux et très honoré de participer à la naissance d’une revue justement consacrée aux contrats publics en Afrique. Nul doute que, grâce à ses fondateurs et contributeurs, elle saura apporter sa pierre à un édifice sans cesse en construction et où chaque collaboration ne peut et ne pourra qu’être la bienvenue.
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