Les collectivités territoriales sont des démembrements de l’Etat prévues par la Constitution sénégalaise du 22 janvier 2001, modifiée disposant qu’elles « constituent le cadre institutionnel de la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques. Elles s’administrent librement par des assemblées élues au suffrage universel direct. Elles participent, à la territorialisation des politiques publiques, à la mise en œuvre de la politique générale de l’Etat ainsi qu’à l’élaboration et au suivi des programmes de développement spécifiques à leur territoire. Leur organisation, leur composition et leur fonctionnement sont déterminés par la loi. La mise en œuvre de la décentralisation est accompagnée par la déconcentration qui est la règle générale de répartition des compétences et des moyens entre les administrations civiles de l’Etat »[1].
Dans le même ordre d’idées, le Code général des Collectivités territoriales[2] qui abroge et remplace la loi n° 96-06 du 22 mars 1996 prévoit deux types de collectivités territoriales au lieu de trois : la commune et le département[3]. Ces institutions fondées sur la liberté dans le cadre de leur administration ont une personnalité morale et une autonomie décisionnelle et financière. La collectivité territoriale, en général, et particulièrement, la commune dispose d’un budget et de ressources propres[4], dont la procédure suit et respecte les règles de la comptabilité publique[5]. Le budget ou les actes de la commune sont appelés à faire l’objet d’appréciation de la part de l’assemblée délibérante élue démocratiquement. Concernant lesdits actes, ils peuvent être retracés dans un compte administratif. L’article 78 du décret n° 66-510 du 4 juillet 1966 dispose que « dès l’arrêté de ses livres, le Maire établit son compte administratif ». En définitive, le compte administratif peut être entendu comme « un document qui retrace une totalité de mouvements. Cela veut dire l’ensemble des recettes et des dépenses que la collectivité territoriale a effectivement réalisées sur une année ».
Le compte administratif peut-il aller sans un compte de gestion ? L’autorité municipale doit tout faire pour qu’il y ait concordance exacte entre le compte administratif et le compte de gestion. Ce dernier est élaboré par le comptable public qui a la charge d’encaisser les recettes et de payer les dépenses ordonnancées par le maire. Le comptable local est obligé de rendre compte une fois par an et il est tenu de « transmettre à la collectivité locale sa situation comptable mensuelle et son compte de gestion annuel »[6]. Au-delà, même si l’exécution du budget local incombe à l’ordonnateur et au comptable de la collectivité territoriale, la Directive n°01/CM/UEMOA portant régime financier des collectivités territoriales au sein de l’UEMOA du 24 juin 2011, en son article 122, énonce que « la comptabilité des collectivités locales est fondée sur le principe de la séparation des fonctions d’ordonnateur et de comptable. Chacun d’eux doit rendre compte de sa gestion ». Par conséquent, l’ordonnateur le fera par la production d’un compte administratif et le comptable par la production d’un compte de gestion[7].
L’intérêt de cette analyse conduit à comprendre que l’ordonnateur ou le Maire relève de l’ordre administratif alors que le comptable public ou le receveur municipal fait partie de la charpente comptable avec le maniement des deniers de la commune. Partant, les principes budgétaires des finances publiques vont surement apparaitre avec un degré suffisamment appréciable. Surtout le principe de l’équilibre budgétaire pour les dépenses et les recettes publiques est vraiment prisé. On peut comprendre pour équilibre, une balance, une équivalence, une égalité de deux choses, de deux parties. Dans un budget, l’équilibre va nécessairement concerner l’ensemble des comptes constitués des dépenses et des recettes de l’Etat. La loi organique relative aux lois de finances sénégalaises de 2001 dispose dans son article premier que « les lois de finances déterminent la nature, le montant et l’affectation des ressources et des charges de l’État, compte tenu d’un équilibre économique et financier qu’elles définissent »[8]. Cet équilibre s’applique principalement au budget général, aux comptes spéciaux du Trésor et aux budgets annexes. Il vise l’équilibre comptable des recettes et des dépenses, avec l’ensemble des dépenses qui ne doivent pas être supérieur à l’ensemble des recettes[9]. En revanche, la loi organique relative aux lois de finances de 2001 ne fait pas allusion à l’équilibre du budget[10]. Dans tous les cas, l’équilibre dont il s’agit ici doit pratiquement être mesuré au niveau des comptes budgétaires de la collectivité territoriale tenus par l’ordonnateur et par le comptable public. Pour preuve, les dispositions de l’article 255 CGCT sont exhaustives étant donné que « le budget d’une collectivité locale est en équilibre réel lorsque la section » fonctionnement » et la section » investissement » sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère, et lorsque le prélèvement sur les recettes de la section » fonctionnement » au profit de la section » investissement « , ajouté aux recettes propres de cette section, à l’exclusion du produit des emprunts, et éventuellement aux dotations des comptes d’amortissement et de provision, fournit des ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d’emprunt à échoir au cours de l’exercice ». La seule conséquence qui se dégage pour l’équilibre est qu’il n’existe pas dans le budget de l’Etat[11]. Le principe de l’équilibre budgétaire est d’application rigoureuse pour les collectivités territoriales. Le respect de ce principe est assuré par le représentant de l’Etat[12].
Par Tidiane BA
Doctorant en Droit public à l’Université Cheikh Anta Diop
1] Article premier de la loi constitutionnelle n° 2016-10 du 5 avril 2016 portant révision de la Constitution (JORS, numéro spécial 6926 du 7 avril 2016, p. 505), article donnant une nouvelle rédaction à l’article 102 ; Conseil constitutionnel, les mises à jour de la Constitution.
[2] Loi n° 2013-10 du 28 décembre 2013, modifée.
[3] Article premier, idem.
[4] Pour plus de précisions : Cf., S. KOUFEDJI : Problématique des transferts financiers entre l’Etat et les collectivités locales : l’exemple du Sénégal et du Bénin, Thèse pour le Doctorat de droit public, Université Gaston Berger de Saint-Louis, 2021, p. 91-144.
[5] Article 10, idem.
[6] Article 210 du Code général des Collectivités Territoriales (CGCT) de 2013 au Sénégal.
[7] A. DIOUKHANE, Les finances locales sénégalaises, Paris, Harmattan, 2018, p. 68.
[8] Loi organique n°2001-09 du 15 octobre 2001.
[9] Article 15 de la Directive UEMOA portant régime financier des collectivités territoriales.
[10] FALL Mor et TOURE Ibrahima, Finances publiques, Approche théorique et pratique, Harmattan, 2018, p. 112.
[11] BOUHADANA Irène et WILLIAM Gilles, « L’autonomie du pouvoir dépensier des collectivités territoriales : quelles contraintes pour quelle optimisation ?, Droit et gestion des collectivités territoriales, vol. 31, 2011, p. 80.
[12] Article 15 Directive UEMOA.
0 commentaires