Le décret portant convocation du corps électoral devant la Cour suprême. Par Papa Makha DIAO

En attendant sa publication au Journal officiel (en principe ce samedi), le PDS et le Front démocratique pour une élection inclusive (FDPEI) comptent attaquer devant la Chambre administrative de la Cour suprême, le décret portant convocation du corps électoral pour l’élection présidentielle du 24 mars 2024. En plus, d’après leur porte-parole, ils comptent y assortir une demande de sursis à exécution. Pour rappel, la procédure du sursis à exécution devant la Cour suprême n’existe plus dans l’ordonnancement juridique. Elle est remplacée depuis 2017 par la procédure du référé administratif.

Il est de principe que la Cour suprême a toujours maintenu sa jurisprudence sur les actes de gouvernement en précisant que rentre dans cette catégorie le décret portant fixation la date du referendum et la convocation du corps électoral, acte qui fait partie des pouvoirs constitutionnels du Président de la République.

Dans l’arrêt n °19 du 17 mars 2016, Ousmane SONKO c/ État du Sénégal, la Cour suprême, a rappelé cette jurisprudence. En effet, le sieur Sonko sollicitait entre autres, l’annulation de décret portant convocation du corps électoral pour le référendum, acte qui fait partie des pouvoirs constitutionnels du Président de la République.

Dans sa réponse, la Cour précisa que constituent notamment des actes de gouvernement ceux par lesquels, le gouvernement participe à la fonction législative, ceux accomplis par le gouvernement à l’occasion de la préparation du référendum et les actes relatifs aux relations internationales.  Enfin, elle conclut que ce décret est un acte de gouvernement insusceptible de recours pour excès de pouvoir.

Outre, le décret portant convocation du corps électoral, acte qui fait partie des pouvoirs constitutionnels du Président de la République, il existe d’autres catégories d’actes de gouvernement, qui encadrent les rapports entre l’exécutif et le parlement . C’est le sens de l’arrêt n° 16 du 28 octobre 2008 opposant Ndeye Fatou Touré à l’État du Sénégal, à propos du décret n° 2008-419 en date du 25 avril 2008 portant convocation du Parlement en congrès et notifié le 21 juillet 2008.

La Cour avait considéré que le décret par lequel le Président de la République convoque le parlement en congrès est un acte de l’exécutif pris dans ses rapports avec le parlement. Cet acte constitue un acte de gouvernement qui échappe au contrôle du juge de l’excès de pouvoir. Il y a lieu de nous ( la Cour suprême) déclarer incompétent.

Dans ces affaires, la Cour estime que ces décrets dont le premier convoque le corps électoral, l’autre, la convocation du parlement en congrès, constituent des actes de gouvernement insusceptibles de recours pour excès de pouvoir. Pour le juge, l’acte de gouvernement est une catégorie juridique qui échappe à son contrôle. Ainsi donc, le recours du PDS et de ses alliés n’a aucune chance de prospérer. Vivement l’élection présidentielle du 24 mars 2024.

Par Papa Makha DIAO

Docteur en droit public de l’UCAD

Papmakha@yahoo.fr

 

 

 

 

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

La responsabilité pénale d’un chef de l’Etat : la gouvernance du régime de Macky SALL en question. Par Mouhamet DIOUF

Les dispositions communautaires obligent tous les nouveaux régimes à un devoir de reddition des comptes . Dans l’exercice de cette prérogative le Président de  la République Bassirou Diomaye  Diakhar Faye a instruit au Premier ministre Ousmane Sonko une...

Vers la création d’une autorité de centralisation de la commande publique au Sénégal ? Par Pathé DIALLO

Après 100 jours à la tête du pays, le Président de la République du Sénégal, S.E Bassirou Diomaye FAYE, a accordé une interview à la presse nationale, le samedi 13 juillet 2024. L'objectif de ce briefing était double : premièrement, faire le point sur les premières...

L’école sénégalaise : L’anglais à l’élémentaire : oui, mais… Par Dr Amar GUEYE 

L'actualité de ces derniers temps est à l’introduction de l’enseignement de l’anglais à l'école élémentaire qui a déclenché un enthousiasme débordant au niveau de l’opinion (« Nouveauté dans l’éducation : l’anglais dès ‘la CM1’. The children will speak...

L’article 87 de la constitution, une entrave à la volonté du peuple sénégalais de changer de paradigme. Par Hamidou CAMARA

La théorie de la séparation des pouvoirs se définit comme la doctrine constitutionnelle prônant la spécialisation des fonctions exercées par les organes de l'État afin d'éviter le cumul de tous les pouvoirs dans une même autorité. Le principe de séparation des...

Quel est l’ordre de priorité en session extraordinaire ? Par Meissa DIAKHATE

L’ordre de priorité dans la procédure parlementaire est une interrogation qui ne saurait trouver sa réponse que dans la compréhension de la configuration du régime politique. Notre régime politique présente la particularité de rationaliser les rapports entre...

Dissolution de l’Assemblée nationale et droit budgétaire. Par Birahime SECK

"L'Assemblée nationale dissoute ne peut se réunir. Toutefois, le mandat des députés n'expire qu'à la date de la proclamation de l'élection des membres de la nouvelle Assemblée nationale".  Avec ce dernier alinéa de l'article 87 de la Constitution, je me demande...

Le rejet du projet de loi en Commission a-t-il un effet utile ? Par Pr Meïssa DIAKHATE

La Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains vient de rompre l’habitus parlementaire qui consistait à bannir, systématiquement, les projets de loi. Oui, notre Assemblée nationale perpétue une tradition bien sénégalaise, à savoir une...

Pour comprendre l’Administration publique. Par Meïssa DIAKHATE, Agrégé de Droit public

  Pour comprendre l’Administration publique   Ba Oumar El Foutijou Bâ, Djibel NdaoL’administration publique face au défi de la performance dans les pays de l’UEMOAL’Harmattan-Sénégal, 2021181 p.Bureau Organisation et MéthodesLe BOM au service de la...

Vers  la  création  d’une Cour Constitutionnelle au Sénégal : Contribution au débat. Par Dr.  Ibrahima  MANDIANG

La décision de créer une Cour Constitutionnelle est une décision du pouvoir constituant originaire[1], mais il arrive qu’à titre provisoire, cette création ou cette modification soit le fait du législateur organique ou spécial ou même ordinaire[2], suivant les...

Faut-il Supprimer l’Assemblée Nationale ? Le Souverain Dérivé, Un Modèle Inefficace Et Dépassé. Par Arona Oumar KANE

L’analyse des listes de candidats investis aux élections législatives sénégalaises de 2022 révèle une anomalie statistique majeure qui permet de comprendre la faiblesse du niveau constaté chez les parlementaires de cette nouvelle législature. Les deux professions les...